« J’ai pas d’ skidoo, j’ai pas d’garage
La slutch partout, moé ça m’enrage
Les grosses tempêtes qui traînent à pus finir
J’ ferme toutes mes fenêtres ; pis j’ veux même pus sortir »
(Plume Latraverse, Lit vert, Album Le vieux show son sale)
Tandis que Dame Nature nous assaille avec de nouvelles précipitations de neige, force est de constater que l’hiver a été dur pour tout le monde. Pas moyen de rencontrer quelqu’un dans la rue sans évoquer le temps froid, la quantité de neige qui recouvre tout et l’entretien lacunaire des trottoirs.
Comme plusieurs, les chutes de neige abondantes de cet hiver me rappellent l’hiver record de 2007-2008. Les voitures ensevelies sous la neige, les cours remplies et les toitures soumises à une forte pression sont le lot de tout un chacun cet hiver.
Mes voisins ont dû déprendre leur voiture, stationnée dans la rue, à de nombreuses reprises. Puis, trouver un endroit pour la stationner durant la nuit pour permettre le bon déroulement des opérations de déneigement. Parfois deux, voire même trois ou quatre jours consécutifs! De quoi enrager.
Quant aux trottoirs, je n’en parle même pas. Ils ont été enneigés plus souvent qu’à leur tour, les rendant presqu’impraticables. Ayant eu à promener mes enfants dans des poussettes dans le quartier Saint-Jean-Baptiste, je comprends bien le mal des parents pour se déplacer dans ces conditions. Avoir à choisir entre une poussette dont les roues s’enfoncent dans la neige ou un traîneau que les automobilistes ne voient pas, mettant notre enfant à risque de se faire rouler dessus n’a rien d’agréable. D’ailleurs, pas plus tard que lundi dernier, j’ai vu une jeune maman peiner à traverser une rue pendant le feu vert en tirant son enfant dans un traîneau. Le conducteur irresponsable au volant de la première voiture immobilisée à l’intersection a démarré en trombe lorsque le feu est passé au vert, faisant une embardée pour contourner le traîneau qui était encore dans la rue à l’expiration de la phase piétonne. Mon cœur s’est arrêté de battre! S’il avait frappé une plaque de glace (et il y en a!), il aurait fort bien pu déraper sur le traîneau.
Les personnes à mobilité réduite subissent le même sort que les jeunes parents. Allez donc sortir avec une canne ou un fauteuil roulant quand les trottoirs n’ont pas été déneigés! Même les biens portants ont juré en constatant qu’il fallait enjamber une congère pour embarquer dans le bus ou pour en débarquer.
Alors, quand je vois qu’une autre bordée de neige s’en vient, je me dis que j’en ai assez de l’hiver, et pourtant…
Je ne peux m’empêcher d’admirer à quel point l’hiver est un bon indicateur du haut niveau de résilience[1] de mon quartier. En effet, je ne peux plus compter le nombre de fois où j’ai vu des voisins s’entraider pour pelleter leur voiture à tour de rôle. Parfois, ce sont même de parfaits inconnus qui s’entraident : passants qui poussent une voiture, qui aident une personne âgée à traverser une rue ou qui soulèvent une poussette pour soulager la maman qui peine à embarquer dans l’autobus. Lorsque j’entends une triste nouvelle, comme le décès d’un homme enseveli sous la neige, je ne peux m’empêcher de penser que les chances que cela arrive ici, en plein centre-ville, sont minces. Les bons samaritains sont nombreux et font mentir la réputation voulant que l’individualisme règne en ville; réputation que bon nombre de personnes qui snobent la ville colportent d’ailleurs sans fondement.
En plus, la neige est incontestablement le royaume des enfants. Malléable, façonnable, empilable, les qualités inhérentes au jeu de la neige sont innombrables. Les enfants peuvent la lancer, s’y cacher, l’utiliser comme matériau de construction, y glisser… Je me fais d’ailleurs un devoir, hiver après hiver, de transformer notre cour en une glissade format géant. Quelques coups de pelle suffisent à faire de l’enfer blanc un terrain de jeu. Bien sûr, on peut penser que les enfants finissent par devenir grands et que l’intérêt pour la neige décroit. Vraiment? Si je me fie à ce skieur hivernal qui s’est élancé sur la côte Salaberry un soir de tempête, le plaisir de glisser ne s’estompe pas avec l’âge!
Finalement, je me réjouis de voir que la neige a un impact sur la démocratie locale. Les plaintes adressées à la Ville concernant les services de déneigement ont été nombreuses cet hiver. Le conseiller municipal du district, monsieur Jean Rousseau, a d’ailleurs lancé une invitation aux citoyens à discuter avec lui de leurs idées pour améliorer la Politique de déneigement de la Ville de Québec. La rencontre aura lieu le mercredi 13 mars à 19h00 au Centre communautaire Lucien-Borne. La remise en question de nos pratiques est un bon exemple d’une société dynamique et capable de s’adapter.
La Ville de Québec a déjà fait la démonstration qu’elle pouvait, elle aussi, s’adapter en modifiant son approche à proximité du lac Saint-Charles. Dans ce secteur, sensible pour la Ville puisqu’elle y puise de l’eau pour le réseau d’aqueduc, le concept d’écoroute est désormais implanté. L’entretien limite l’épandage de sels de voirie, laissant la chaussée sur fonds de neige. Pour ma part, cette nouveauté est porteuse d’espoir : peut-être que les piétons auront bientôt une écoute plus attentive de l’administration lorsque vient le temps d’octroyer les contrats de déneigement.
Du moins, c’est un souhait que j’exprime. Peut-être qu’ainsi, j’aurais moins tendance à dire « maudit hiver »!
N.B. Ce premier « Coup de gueule » pourrait bien être suivi par d’autres. Réagissez à ce cette chronique ou encore mieux, rédigez la vôtre. Après tout, le Bourdon est aussi là pour permettre aux lecteurs de prendre la plume à leur tour…
[1] La résilience est la capacité d’une collectivité à persister ou à maintenir son fonctionnement face à une perturbation. Source : Wiktionnaire.
Félicitations pour cette article nuancée.
Aussi bien l’hiver – ou le maudit hiver, que les premiers flocons de neige poétiques – ou la maudite M… blanche: ne peuvent être considérer comme en LE problème.
L’hiver, la neige, sont des constantes incontournables. Bien sûr certains hivers sont plus « durs » que d’autres, mais c’est plutôt sur nos modes de transports que doit porter notre réflexion, voire nos indignations.
Si on prenait la peine de les remettre en question on trouverait bien des pistes de solution, et je ne parle pas de plus grosses machineries ou de plus grands dépôts à neige…
Visitez la page FB / Piéton-nes à Québec
Je ne manque pas de lire les publications sur la page Facebook Piétons, piétonnes à Québec. Je suis tout à fait d’accord que la solution technique (plus de machinerie, plus grosse) n’est pas ce dont les marcheurs et les marcheuses ont besoin 😉
Petite information ponctuelle: on annonce du déneigement de nuit sur le boulevard René-Lévesque: https://www.ville.quebec.qc.ca/apropos/espace-presse/actualites/fiche_autres_actualites.aspx?id=19171. Parions que d’autres suivront bientôt.
Parce que l’administration municipale, malgré ses discours sur la sécurité routière, a les deux pieds dans la même bottine; quand « Piéton-nes à Québec » sur FB aura rejoins suffisamment de gens préoccupés par des corridors piétonniers sécuritaires, nous initierons des activités de mobilisons citoyennes. J’ai déjà quelques idées à partager le moment venu.
Merci pour votre implication 😉