Pamplemousse nous expose à une relation amoureuse qui explose en vol. À l’intersection de la poésie, de la musique et des mouvements corporels, la pièce nous invite à explorer les possibles d’une relation qui aurait pu être unique.

La pièce se penche sur l’analyse de l’après-relation, quand il ne reste plus que les souvenirs à ressasser et les blessures à gratter pour qu’elles ne guérissent jamais. Dans une volonté manifeste d’explorer les particularités des relations queers et lesbiennes, l’auteure décrit l’amour au temps des lattés au lait d’avoine et des plantes vertes qu’on finit par laisser mourir plus ou moins volontairement, évoluant au rythme d’une culture pop queer dont on partage les codes.

Pour Elisabeth Lavoie, l’auteure du texte, il s’agissait d’écrire “une histoire d’amour à laquelle je pouvais m’identifier, le genre d’histoire que j’aurais aimé voir plus jeune. Écrire un spectacle queer qui ne se centre pas dans la souffrance et la marginalisation, une tragédie moderne aux détours poétiques et aux arrières goûts doux-amer, comme un pamplemousse”. L’écriture est intéressante, en ce qu’elle explore de manière circulaire les questionnements qui viennent après la fin de la relation. Et si on avait fait autrement? Et si j’avais dit ceci plutôt que cela? Et si j’avais fait un pas dans telle ou telle direction? Ce questionnement n’apporte pas de réponse. Les deux ex sont bloquées dans leur passé et rejouent en boucle leurs amours inachevées.

Entre les doux instants du quotidien et l’amertume de celle qui voudrait être mieux aimée, Pamplemousse évoque les insécurités inhérentes à l’amour. “C’est pas parce que tu m’aimes que je me sens aimée” dit l’une d’entre elle. La pièce ne propose néanmoins ni échappatoire ni réponse face aux ratés de la relation. Elle se concentre plutôt sur les plaies et la sur-analyse des moments les plus intenses, entre la poésie des réveils doux et les longueurs esthétisantes des moments où tout dérape.

Deux choses à retenir de Pamplemousse: la mise en scène moelleuse et sensuelle (fabuleux décors de Simon Rollin) et la lumière. Les éclairages de Samy Girard (également directrice de production) sont parfaitement à-propos, doux et charnels quand la tendresse du moment l’exige, fébriles et tranchants quand les échanges se font blessant. Il faut également saluer le travail d’écriture et l’aspect concentrique du texte, très bien porté par les deux comédiennes, Pascale Chiasson et Elisabeth Lavoie, dont la complicité est évidente.

C’est aussi une belle occasion de voir ce que le female gaze peut apporter à la représentation théâtrale. “Nous voulons transposer cette technique au théâtre par l’isolement des parties du corps à l’aide d’un découpage précis de la lumière, de jeux d’ombres, de projections vidéo, de danse et d’une direction du mouvement des personnages dans l’espace” mentionnent Les Moires, le collectif qui produit Pamplemousse. Un angle tout à fait intéressant, que l’on voit peu encore dans le théâtre contemporain.

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